André administrateur
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Posté le: Mar 02 Avr 2013 11:37 pm Sujet du message: Découverte de la 1ère étoile massive en fuite émettrice de r |
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Découverte de la 1ère étoile massive en fuite émettrice de rayons gamma
Salut à tous
Les étoiles massives, dont la masse dépasse environ 10 masses solaires (et pouvant aller jusqu'à plus de 100 masses solaires), ont la particularité d'être très lumineuses (jusqu'à un million de fois la luminosité du Soleil).
Imag ; Nasa
Avec une telle luminosité, leur propre lumière est capable d'exercer une pression sur leurs couches extérieures, éjectant ainsi en continu de grandes quantités de matière.
Il s'agit du phénomène de vent stellaire, conduisant à l'éjection de l'équivalent de la masse du Soleil en quelques millions d'années (voire quelques dizaines de milliers d'années pour les cas les plus extrêmes), avec des vitesses de l'ordre de 2000 kilomètres par seconde.
Ces étoiles massives évoluent sur des temps caractéristiques de l'ordre de 10 millions d'années (soit environ 1000 fois moins que le Soleil).
Par conséquent, elles n'ont généralement pas le temps de s'éloigner significativement de leur site de formation avant d'exploser en supernova (stade final d'évolution des étoiles massives).
Toutefois, dans quelques cas peu fréquents, certaines étoiles peuvent être violemment éjectées de leur lieu de naissance : on parle alors d'étoile en fuite.
Un tel phénomène se produit soit lors de l'explosion de supernova, ou alors en conséquence d'interactions dynamiques entre étoiles dans un amas relativement richement peuplé.
Lorsqu'une étoile massive est ainsi éjectée, elle traverse le milieu interstellaire et l'interaction de son vent stellaire avec la matière qui constitue ce milieu conduit à la formation d'un choc hydrodynamique en forme d'arc, en avant de l'étoile.
La matière le long de cet arc est quelque peu comprimée, et sa température supérieure à celle de la matière qui n'a pas encore traversé le choc.
Cela conduit à des structures repérées notamment en infrarouge à proximité de quelques-unes de ces étoiles en fuite.
Ces chocs sont aussi le siège de processus physiques intéressants, incluant notamment l'accélération de particules jusqu'à des vitesses proches de celle de la lumière.
En 2012, des astrophysiciens argentins (l'étudiante en thèse de doctorat Maria del Valle,
sous la supervision du Professeur Gustavo Romero) ont publié un article décrivant un modèle prédisant que les chocs associés à ces étoiles en fuite pourraient accélérer des particules (électrons et protons) jusqu'à des hautes énergies, l
es rendant ainsi capables d'émettre des rayonnements de haute énergie, tels que des rayons gamma.
Pour ainsi dire au même moment, un catalogue de sources astronomiques de haute énergie détectées par le satellite Fermi a été publié, répertoriant notamment une source de rayons gamma (2FGL J2030.7+4417) dont la position coïncide avec un de ces objets, l'étoile HD195592.
Cette coïncidence dans les événements (la publication du modèle et la détection gamma) a interpellé l'astrophysicien Michaël De Becker (Université de Liège), qui travaillait notamment sur HD195592, et à propos de laquelle il avait précédemment publié un article attestant de propriétés particulières pour cet objet :
HD195592 ne serait pas isolée, mais serait un système binaire, avec des propriétés laissant même penser à un système triple. Michaël De Becker a aussitôt attiré l'attention du Professeur Gustavo Romero,
avec lequel il collabore depuis plusieurs années, sur le cas de HD195592, et ce fut le point de démarrage d'une collaboration sur cet objet. Sur base du modèle théorique (del Valle & Romero),
et des informations spécifiques de l'objet réunies au moyen de multiples études observationnelles (De Becker), des prédictions quantitatives ont révélé que HD195592 pourrait bien être à l'origine de l'émission de rayons gamma détectée par le satellite Fermi.
Les informations qui ont permis de contraindre le modèle étaient notamment issues d'observations dans le domaine visible réalisées à l'Observatoire de Haute-Provence,
d'observations antérieures dans les rayons X réalisées avec le satellite européen INTEGRAL, des observations dans l'infrarouge relatives à la matière comprimée au niveau du choc, et bien sûr la détection en rayons gamma.
D'après la confrontation du seul modèle existant au cas particulier de HD195592, l'émission de rayons gamma telle que détectée par Fermi peut s'expliquer par l'existence d'électrons relativistes (dont la vitesse est proche de celle de la lumière) accélérés au niveau du choc entre le vent stellaire et la matière interstellaire.
Ces électrons relativistes sont susceptibles d'interagir avec de la lumière peu énergétique, en transférant une partie de leur énergie à cette lumière :
la lumière peu énergétique devient dès lors très énergétique, donc dans le domaine des rayons X et des rayons gamma.
Dans le cas du choc d'une étoile en fuite, la source de lumière de basse énergie n'est pas l'étoile elle-même, trop loin du lieu où les électrons sont accélérés.
C'est la matière chauffée au niveau du choc (en particulier la poussière interstellaire) qui fournit cette lumière, sous forme de rayonnement infrarouge (cfr image), donc à proximité directe du lieu d'accélération des électrons relativistes.
Ce scénario, appuyé par des estimations quantitatives, indique que HD195592 pourrait très bien être la toute première étoile massive en fuite émettrice de rayonnement gamma connue à ce jour.
Par ailleurs, aucun autre objet connu à ce jour dans cette région du ciel ne pourrait expliquer l'émission gamma détectée par le satellite Fermi.
D'autres études sont en cours, notamment dans le domaine visible, en vue de clarifier la nature des étoiles constituant le système multiple HD195592,
ainsi qu'en hautes énergies (rayons X et rayons gamma) accélérés dans ce système, afin de mieux comprendre ce processus d'accélération actif dans divers environnements astronomiques souvent liés aux étoiles massives.
Ce processus est responsable de la production des rayons cosmiques galactiques, c-à-d. des particules de haute énergie qui traversent notre galaxie en permanence avec des vitesses proches de celle de la lumière.
Ces résultats font l'objet d'une publication dans le journal Astronomy & Astrophysics.
Sources :
- Département d'Astrophysique - Géophysique et Océanographie - Faculté des Sciences - Université de Liège - tél. : +32 (0)4 366 97 17 - Dr. Michaël De Becker - debecker@astro.ulg.ac.be
- ULg Presse-Communication - tél. : +32 (0)4 366 52 17 ou 52 11 - press@ulg.ac.be
Rédacteurs :
Didier Moreau - dmoreau@ulg.ac.be
Origine :
BE Belgique numéro 71 (13/03/2013) - Ambassade de France en Belgique / ADIT - http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/72539.htm
Amicalement _________________ Etrange époque où il est plus facile de désintégrer l' atome que de vaincre un préjugé.
Einstein, Albert, |
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